La loi de finance 2022 vient apporter un réaménagement des procédures de recours fiscal. En effet, ce réaménagement fait suite à un long processus de réforme. Les étapes importantes de cette réforme ont été :

La loi de finance 2022 est une des dernières pierres à l’édifice. En effet, elle a apporté des modifications ayant pour objectif d’améliorer les garanties des contribuables et de valoriser les missions des commissions de recours.

Comment ces modifications s’inscrivent-elles dans le paysage global ?

1.     Principes de base : Droit de contrôle de l’Administration

Le code général des impôts accorde, dans son article 210, un droit de contrôle à l’administration fiscale. En effet, cet article stipule un certain nombre de principes :

Le principe de contrôle

Dans ce sens, il est stipulé dans cet article que : l’administration fiscale contrôle les déclarations et les actes utilisés pour l’établissement des impôts, droits et taxes.

Le principe de justification des déclarations

Ce principe fait équilibre au principe de la fiscalité déclarative. En effet, les contribuables sont à l’origine de la déclaration de leurs bases fiscales dans le respect des dispositions légales. De ce fait, lors d’un contrôle, en vertu de l’article 210 du CGI ils « sont tenus de fournir toutes justifications nécessaires et présenter tous documents comptables aux agents assermentés de l’administration fiscale ayant au moins le grade d’inspecteur adjoint et qui sont commissionnés pour procéder au contrôle fiscal ».

Le principe de justification par l’Administration de ses chefs de redressement

Ainsi, dans l’article 220 du CGI, si l’Administration procède à la rectification des bases d’imposition déclarées, elle doit informer le contribuable :

  • des motifs, de la nature et du montant détaillé des redressements envisagés en matière d’impôt sur les sociétés, d’impôt sur le revenu ou de taxe sur la valeur ajoutée ;
  • de la nouvelle base devant servir d’assiette à la liquidation des droits d’enregistrement ainsi que le montant des droits complémentaires résultants de cette base.

Cette mesure ouvre le droit du contribuable de se défendre selon les voies de recours prévues par la loi.

2.     Quelles sont les voies de recours du contribuable contre les rectifications de l’Administration ?

Le Code Général des Impôts donne au contribuable plusieurs voies de recours contre les redressements qu’il juge non justifiés. L’objectif étant de garantir l’équité de la procédure de contrôle,

Notifications et lettres de réponse

Ces recours sont :

  • D’abord, la première lettre de réponse. En effet, l’inspecteur des impôts doit inviter, dans sa première lettre de notification, le contribuable à produire ses observations sur la notification des chefs de redressement dans un délai de trente (30) jours suivant la date de réception de la lettre de notification;
  • Ensuite, la deuxième lettre de réponse. En effet, lorsque l’Administration maintient ses chefs de redressements après réception des observations du contribuable, elle doit le notifier au contribuable dans un délai de 60 jours après la réception de la première lettre de réponse. Elle doit mentionner que sa position devient définitive si le contribuable ne se pourvoit pas devant la commission locale de taxation ou la commission nationale de recours fiscal.

Les procédures de recours fiscal : Les Commissions Locales de Taxation et Les Commissions Nationales de Recours Fiscal

Les Commissions Locales de Taxation (CLT)

Les commissions locales de taxation sont régies par l’article 225 du Code Général des Impôts.

Chaque commission comprend :

  • un magistrat, président ;
  • un représentant du gouverneur de la préfecture ou de la province dans le ressort de laquelle est situé le siège de la commission ;
  • le chef du service local des impôts ou son représentant qui tient le rôle de secrétaire rapporteur ;
  • un représentant des contribuables appartenant à la branche professionnelle la plus représentative de l’activité exercée par le contribuable requérant.

Leur rôle est de statuer sur les litiges qui leurs sont soumis à la suite à la procédure citée ci-dessus. Selon la loi, elles doivent se déclarer incompétentes lorsqu’il s’agit de l’interprétation des dispositions légales et réglementaires.

Ces commissions ont compétence dans les cas suivants :

  • rectifications en matière de revenus professionnels déterminés selon le régime de la contribution professionnelle unique, de revenus et profits fonciers, de revenus et profits de capitaux mobiliers et des droits d’enregistrement et de timbre ;
  • vérification de comptabilité des contribuables dont le chiffre d’affaires déclaré au compte de produits et charges, au titre de chaque exercice de la période non prescrite vérifiée, est inférieur à dix (10) millions de dirhams.

Commission Nationale de Recours Fiscal (CNRF)

Instituée par l’article 226 du Code Général des Impôts, il s’agit d’une commission permanente qui siège à Rabat, chargée de statuer sur les recours fiscaux relatifs :

  • à l’examen de l’ensemble de la situation fiscale des contribuables prévu à l’article 216 ci-dessus, quel que soit le chiffre d’affaires déclaré ;
  • aux vérifications de comptabilité des contribuables lorsque le chiffre d’affaires déclaré au compte de produits et charges, au titre de l’un des exercices vérifiés, est égal ou supérieur à dix (10) millions de dirhams ;
  • aux rectifications des bases d’imposition pour lesquelles l’administration invoque l’abus de droit
  • les recours pour lesquels les commissions locales de taxation n’ont pas pris de décision dans le délai de (12) douze mois.

Cette commission est composée de :

  • sept (7) magistrats appartenant au corps de la magistrature,
  • trente (30) fonctionnaires
  • cent (100) personnes du monde des affaires

3.     Quels sont les apports de la loi de finance 2022 ?

Les procédures de recours fiscal: Création de Commissions Régionales de Recours Fiscal (CRRF) et réaménagement des Commissions Locales de Taxation (CLT)

Commission Régionales de Recours Fiscal

Le loi de finance 2022 prévoit l’institution d’une nouvelle commission dite « Commission Régionale de Recours Fiscal ». Les contribuables adresseront les recours suivants à la CRRF :

  • ceux portant sur la vérification de comptabilité des contribuables dont le chiffre d’affaires déclaré est inférieur à dix (10) millions de dirhams,
  • ceux relatifs aux rectifications en matière de revenus et profits de capitaux mobiliers.

La composition des CRRF sera la suivante :

  • un magistrat président,
  • deux représentants de l’administration,
  • et deux représentants du contribuable.

Commissions Locales de Taxation

Dès lors, les compétences des commissions locales de taxation existantes (« CLT ») seront limitées aux rectifications en matière de :

  • revenus professionnels déterminés selon le régime de la contribution professionnelle unique,
  • revenus et profits fonciers,
  • droits d’enregistrement et de timbre.

Pour renforcer l’efficacité des CLT, le PLF 2022 prévoit  :

  • que le choix du représentant des contribuables peut également être effectué parmi les notaires et/ou adouls,
  • de confier le secrétariat des CLT à un représentant de l’administration fiscale, sans référence au « chef du service local des impôts »,
  • de proroger le mandat des représentants des contribuables sortants jusqu’à la désignation des nouveaux représentants,
  • une disposition relative à l’incompatibilité, afin d’éviter que les personnes ayant eu à connaitre des dossiers dans le cadre de l’exercice de leurs activités et /ou fonctions, prennent part aux travaux des commissions.

Réaménagement de la composition de la Commission nationale du recours fiscal (« CNRF »)

Dans l’objectif de renforcer l’efficacité de la CNRF, le PLF 2022 propose les mesures suivantes:

  • Premièrement, préciser que les représentants des contribuables peuvent être choisis parmi les experts-comptables et/ou des comptables agréés,
  • Deuxièmement, fixer à trois (3) ans renouvelable une seule fois, la durée pendant laquelle les membres représentant l’administration siègent à la Commission,
  • Troisièmement, proroger d’office le mandat des représentants des contribuables sortants jusqu’à la désignation des nouveaux représentants,
  • Finalement, élargir les cas d’incompatibilité pour couvrir l’ensemble des membres de la commission ayant déjà eu à connaître le litige.

L’ensemble de ces mesures devrait réduire la charge de travail des commissions actuelles. De plus, ces procédures de recours fiscal devraient apporter de nouvelles garanties aux contribuables et améliorer l’efficacité globale du processus de recours.

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Commissions Régionales du Recours Fiscal (CRRF)